Pour ce qui concerne cette grammaire, j'appelle «wallon» un ensemble d'usages linguistiques:
Certains de ces critères peuvent être en porte-à-faux: ainsi, des locuteurs affirment encore (quoique moins qu'auparavant) parler «wallon» là où les dialectologues voient du picard ou du gaumais ; certains locuteurs affirment parler «wallon » là où une définition restrictive (dialectologique, puriste...) verrait du «français régional» wallonnisé.
Dans le premier cas, j'ai utilisé moi-même une définition relativement étroite excluant les parlers plutôt picards et gaumais parlés au-delà de La Louvière (ouest) et au sud de la forêt ardennaise ; en revanche, dans le deuxième cas, cette grammaire se veut ouverte à des formes parfois condamnées au nom d'une définition plus restrictive de ce qui est ou n'est pas wallon. D'un point de vue dialectologique également, les limites entre le wallon et les langues d'oïl voisines sont relativement floues: certains traits considérés comme picards se trouvent dans des parlers de la région de Charleroi (p. ex. muchî pour moussî), alors que certains traits tenus pour wallons se retrouvent dans le picard de Wallonie (p. ex. la diphtongaison dans biète ou la conservation du s dans (è)spène...). Enfin, cette grammaire s'intéresse surtout au wallon contemporain et ignore presque complètement les usages anciens (conscience des locuteurs, dialectologie, littérature...).
L'appellation unitaire «wallon» se justifie, à mon sens, par la concordance générale entre ces divers critères: malgré des divergences de détails, ils circonscrivent tous, selon des points de vue différents, un même objet. La présente grammaire est une tentative de description de cet objet.
Pablo Saratxaga 2012-05-20